lundi 28 mars 2016

SCC8/9 - Postface (A) : Ainsi allait la vie des gens au sein d'une société sorcière


Ainsi allaient les aventures de Gavroche et de Thijl Uilenspiegel. Et celles de Leuk-le-lièvre. Et celles de Golo-le-singe qu'on disait querelleur, chahuteur et carotteur, mais qui était aussi magicien et forgeron. Ainsi allaient les tribulations de  Mopoie et de Bangazegino et de tous les irréductibles de l'Université de Makala...
Ainsi allait aussi la vie du "petit peuple" au sein de la société sorcière. Le peuple des laissés-pour-compte, des brocardés et des vilipendés :maraudeurs, shayeurs et camelots, bana mayi et bana pétrole, glaneuses et vendeuses de diata et d'entrailles de poissons (ou de "bottes" d'os de poulet récupérés chez des fabricants de charcuterie à Kingabwa), mingando du quartier Paka-Djuma, "petites 207" devant effectuer un versement à leur "famille" tous les soirs, ngembo et shégués, bana matiti slalomant entre les véhicules,pickpockets et voleurs à l'arraché, détaillants de noix de diamba et de cigarettes "spéciales" déjà roulées, vendeurs de makasu, de racines aphrodisiaques et d'aspirines à la sortie des bars, passeurs de flaques d'eau des rues inondées des environs du Zando ya Munene, tireurs de pousse-pousse, sentinelles, quados et portefaix, katakata installés à la sortie des chambres froides, wewas sans plaques d'immatriculation, chargeurs de taxibus et réparateurs de billets de banque déchirés, fabricants de visas et de cachets officiels, creuseurs et casseuses de pierres, distillateurs de lotoko ou de zododo, brocanteurs, cisailleurs et ferrailleurs, revendeurs d'attaches et de buses métalliques du chemin de fer des Uélés laissé à l'abandon (ou de rails de l'ancienne ligne allant de Mélo à Kpalimé ou de câbles en cuivre dérobés dans les gares de Forrières, de Jemelle ou de Marloie), électriciens amateurs spécialisés dans le branchement de lignes pirates, voleurs de régimes dans les plantations, braconniers et revendeurs de viande de brousse pendant la période de fermeture de la chasse,contrebandiers, voleurs d'oies, de vaches et de moutons, de canards et de poules, de mangues, de maïs, d'ignames et de pommes de terre qui n'arrêtaient pas d'être "tracassés", arrêtés, rançonnés et tabassés par les corps habillés en bleu et en kaki aux ordres de tous les grands prédateurs dont la fourberie, l'absence de scrupules et la totale indifférence au sort de la population étaient connus de tous.

La Haute Hiérarchie, les "services" et les crapuleux reprochaient, en effet, à tous ces "batu wana ", ces "batu ya pamba-pamba", ces "mpiakeurs", ces "babola" ou ces "espèces d’individus " de trop bien parler et de RIIIR trop fort, d'être trop démerdard(e)s et trop entreprenant(e)s, de refuser de se laisser affamer et de parvenir à toujours survivre...  Au taux du jour, certes, mais effrontément !, dans des sociétés sorcières qui s'obstinaient à nier leur existence.
La Haute Hiérarchie, les "services" et les crapuleux reprochaient également à tous ceux qu'ils traitaient de "marginaux" (les passeurs de flaques d'eau, les creuseurs et les casseuses de pierres, certes... mais aussi les hommes de l'art et les "réparateurs" en tous genres qui inventaient et mettaient en oeuvre des techniques ingénieuses permettant d'améliorer les conditions d'existence des gens, les nouveaux cadres qui refusaient d'être les philosophes-conseils, les journalistes-tapins ou les juges aux ordres de la sorcellerie, les vigiles et les lanceurs d'alerte de La Lucha et de Filimbi, les passeurs d'idées et activistes des mouvements citoyens, Gavroche et Thijl Uilenspiegel, Mopoïe et Bangazegino...) de devenir au fil des temps les véritables héros (et héroïnes) et représentant(e)s du peuple dont ils illustraient la capacité de survie, l'aspiration au changement et à l'innovation, l'esprit de résistance à l'arbitraire et d'insoumission à la dictature
Et de réussir à s'aménager des "maquis" de liberté soigneusement préservés et d'être toujours capables de glousser de leurs malheurs et de se gausser de leurs bourreaux... Ata auraient-ils été placés au mitard dans un camp soda, enfermés dans un warka ou un cul-de-basse-fosse, condamnés par une justice aux ordres et envoyés aux oubliettes  à l'Université de Makala !
Et de continuer à monter... Au détriment des sorciers, des "services" et des crapuleux ! Et sans jamais rien leur concéder, sans kokaba ni kolomba !,  des débrouilles ingénieuses, réjouissantes et astucieuses et même des "cops" et des coups fumants qui réjouissaient toute la population.

Ainsi allaient donc Vieux Condor (alias Kovo, alias Mukokoli, alias Mutu ya Libandi) et celui qu'on appelait Lédenté (alias Mapengo), le meneur et l'asocial, aujourd'hui alliés. Bien déterminés tous les deux à exercer pleinement leur droit de vivre, de travailler (ou de glander, de paresser ou de rêver, sans obéir à un Dieu, à un propriétaire ou à un patron, sans chercher à produire ou à consommer davantage), de s'exprimer, de se réunir et de manifester, de boire, de manger, d'aimer et de penser librement, joignant leurs forces et esquivant habilement tous les coups, disparaissant, réapparaissant, survivant insolemment à toutes les campagnes de diffamation et d’éradication qui visaient à les exterminer, aux traques dont ils faisaient l’objet, aux tortures et mauvais traitements qui leur étaient infligés.
Et lançaient-ils des mangues pourries, du purin d'orties, des billes d'acier et des clous à quatre pointes sur les 4x4 climatisées et militarisées qui parcouraient la ville impunément, à grande vitesse et toutes sirènes hurlantes, pour intimider ou terroriser la population.
Et jetaient-ils des pralines explosives (fourrées au poil à gratter, au pili-pili, au fluide glacial ou à la bile de crocodile) et des cacas Molotov dans les salons et les jardins des palais-forteresses et des résidences-bunkers à l’abri desquelles les sorciers, les agents des "services" et les crapuleux s'imaginaient pouvoir ripailler tranquillement, hors d'atteinte du regard de la population et de sa colère légitime.

Et voici ce que les sorciers, les "services" et les crapuleux disaient du corbeau et du  renard :  "Ce sont des kuluna ! Ce sont des rappeurs du Negatif Clan, les épigones des bandes de Blacks (soki Jack, soki Wolves, soki Demolition) qui sévissent depuis des années ! Panza bango ! Ce sont eux qui soutiennent et inspirent les voyous de la Tshangu, de Matete (alias Londres) et de Yolo-Nord (alias Dallas), les glandeurs impudents qui "tiennent les murs" du quartier Malibran (le quartier le plus pauvre de la châtellenie d'Awel, ce qui explique tout, n'est-ce pas ? les pauvres, de toute évidence, sont coupables de la plupart des délits, n'est-ce pas ?) ou les manifestants obstinés du quartier de Bè à Mélo ! Kanga bango ! Kotisa bango ! Ce sont des frustrés et des insatisfaits qui jalousent notre bonne fortune ! Ce sont des comploteurs, des émeutiers, des anarchistes et des partageux ! Beta bango ! Boma bango !"
Et voilà ce que répliquaient le corbeau et le renard "Nous sommes trop nombreux ! Le voudraient-ils, ils ne pourraient pas nous arrêter tous ! Ils ne savent même pas qui nous sommes ni où nous trouver... mais nous, nous avons un énorme avantage sur eux : nous savons qui ils sont et nous savons où ils habitent !"
Et pissaient-ils et crachaient-ils effrontément à la gueule des sorciers et de tous les larbins qui leur léchaient les couilles ou la chatte: prédicateurs et publicistes, gens d'armes et banquiers, diaspourris et coopérants-mercenaires ou agents doubles, bonimenteurs et saltimbanques, musiciens de cour et valets de plume portant des livrées aux armes de leurs maîtres...

Et fourbissaient-ils et durcissaient-ils leurs RIIIR !









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